
Antigone chawnia : texte adapté d’Antigone pour être jouée par des lycéens
texte adapté d’Antigone pour être jouée par des lycéens : Antigone chawnia
Adaptation et mise en scène : Antigone chawnia ZIANI Karim
Lycée Ahmed Al Idrissi à Chefchaouen 2019
Noms et prénoms | Rôles |
Zainab bakhat | Antigone |
Chifae akedi | Ismène |
Tasnim srifi | Créon |
Ayoub oulad ben hsein | Hémon |
Ouassima makhchane | La nourrice |
Salma amesmoud | Le prologue |
Yacine ardoun | Garde jonas |
Youssef bouzizoua | Garde durand |
Lamiae merroun | Eurydice |
Oumaima khatour | Garde boudous |
Salma mezgane | Le messager |
Oussama hamdoun | La musique |
Imane bouchar | Le chœur |
Karim ziani | Metteur en scène |
Ce travail était dans le cadre de la vie scolaire, il fait partie des activités de l’atelier Molière animé par le même professeur.
On avait au début participé au festival de Med El Jem au mois de février, rien que pour chasser le trac, car ce genre d’activités théâtrales accepte les pièce en arabe, arabe dialectale, l’amazigh et le français. Donc on préparait bel et bien les élèves pour le festival d’Oulad Teima (https://www.youtube.com/watch?v=EeIe5nk6Iog) , qui est destiné seulement au théâtre en français.
La participation a eu lieu au complexe culturel de la même ville, le 2 avril 2019. La pièce d’Antigone Chawnia a remporté le prix de la meilleure scénographie.
Ce texte est dédié a tous les profs de français qui veulent déguster la mise en scène et aussi la puissance du théâtre comme outil pédagogique.
Antigone chawnia Scène 1
LE PROLOGUE
Voilà. Ces personnages vont vous jouer l’histoire d’Antigone. Antigone, c’est la petite maigre qui est assise là-bas, et qui ne dit rien. Elle regarde droit devant elle. Elle pense. Elle pense qu’elle va être Antigone tout à l’heure, et se dresser seule en face du monde, seule en face de Créon, qui est le roi. Elle pense qu’elle va mourir, elle aurait bien aimé vivre. Mais il n’y a rien à faire.
Elle sent qu’elle s’éloigne à une vitesse vertigineuse de sa sœur Ismène, qui bavarde et rit avec un jeune homme, de nous tous, qui sommes là bien tranquilles à la regarder.
Le jeune homme avec qui parle la blonde, Ismène, c’est Hémon, le fils de Créon. Il est le fiancé d’Antigone. Tout le portait vers Ismène : car Ismène est bien plus belle qu’Antigone. Il ne savait pas qu’il ne devait jamais exister de mari d’Antigone sur cette terre et que ce titre princier lui donnait seulement le droit de mourir.
Cet homme robuste, aux cheveux blancs, c’est Créon. C’est le roi. Il a des rides, il est fatigué. Il joue au jeu difficile de conduire les hommes.
La vieille dame qui tricote, à côté de la nourrice qui a élevé les deux petites, c’est Eurydice, la femme de Créon. Elle tricotera pendant toute la tragédie jusqu’à ce que son tour vienne de se lever et de mourir. Elle est bonne, digne, aimante. Elle ne lui est d’aucun secours.
Créon est seul. Seul avec son petit page qui est trop petit et qui ne peut rien non plus pour lui.
Ce garçon pâle, là-bas, au fond, qui rêve adossé au mur, solitaire, c’est le Messager. C’est lui qui viendra annoncer la mort d’Hémon tout à l’heure. C’est pour cela qu’il n’a pas envie de bavarder ni de se mêler aux autres. Il sait déjà…
La nourrice est comme la mère d’Antigone.
Enfin les trois hommes rougeauds qui jouent aux cartes, leurs chapeaux sur la nuque, ce sont les gardes. Ce ne sont pas de mauvais bougres, ils ont des femmes, des enfants, et des petits ennuis comme tout le monde. Ils sentent l’ail, le cuir et TABA et ils sont dépourvus de toute imagination. Ce sont les auxiliaires toujours innocents et toujours satisfaits d’eux-mêmes, de la justice. Pour le moment, jusqu’à ce qu’un nouveau chef de Thèbes leur ordonne de l’arrêter à son tour, ce sont les auxiliaires de la justice de Créon.
Cet homme rouge, c’est le garde il veille à respecter la loi.
Et maintenant que vous les connaissez tous, ils vont pouvoir vous jouer leur histoire.
Elle commence au moment où les deux fils d’Oedipe, Etéocle et Polynice, qui devaient régner sur Thèbes un an chacun à tour de rôle, se sont battus et entre-tués sous les murs de Chefchaouen, Etéocle l’aîné, au terme de la première année de pouvoir, ayant refusé de céder la place à son frère. Sept grands princes étrangers que Polynice avait gagnés à sa cause ont été défaits devant les sept portes de Thèbes.
Maintenant Chaouen est sauvée, les deux frères ennemis sont morts et Créon, le roi, a ordonné qu’à Etéocle, le bon frère, il serait fait d’imposantes funérailles, mais que Polynice, le vaurien, le révolté, le voyou, serait laissé sans pleurs et sans sépulture, la proie des corbeaux et des chacals… Quiconque osera lui rendre les devoirs funèbres sera impitoyablement puni de mort.
Antigone chawnia scène 3 :
LA NOURRICE
D’où viens-tu?
ANTIGONE
De me promener, nourrice. C’était beau. Tout était gris. Maintenant, tu ne peux pas savoir, tout est déjà rose, jaune, vert. C’est devenu une carte postale. Il faut te lever plus tôt, nourrice, si tu veux voir un monde sans couleurs. Elle va passer.
LA NOURRICE
Il va falloir te laver les pieds avant de te remettre au lit.
ANTIGONE
Je ne me recoucherai pas ce matin
LA NOURRICE
La nuit! C’était la nuit! Et tu veux me faire croire que tu as été te promener, menteuse! D’où viens-tu?
ANTIGONE, a un étrange sourire.
C’est vrai, c’était encore la nuit. Et il n’y avait que moi dans toute la campagne à penser que c’était le matin. C’est merveilleux, nourrice. J’ai cru au jour la première aujourd’hui.
LA NOURRICE
Fais la folle! Fais la folle! Je la connais, la chanson. J’ai été fille avant toi. Et pas commode non plus, mais dure tête comme toi, non. D’où viens-tu, mauvaise?
ANTIGONE, soudain grave.
Non. Pas mauvaise.
LA NOURRICE
Tu avais un rendez-vous, hein? Dis non, peut-être.
ANTIGONE, doucement.
Oui. J’avais un rendez-vous.
LA NOURRICE
Tu as un amoureux?
ANTIGONE, étrangement, après un silence.
Oui, nourrice, oui, le pauvre. J’ai un amoureux.
LA NOURRICE, éclate.
Ah! c’est du joli! c’est du propre! Toi, la fille d’un roi! Donnez-vous du mal ; donnez-vous du mal pour les élever! Elles sont toutes les mêmes! Tu n’étais pourtant pas comme les autres, toi, à te mettre du rouge aux lèvres, à chercher à ce qu’on te remarque. Les garçons ne verront qu’Ismène avec ses bouclettes et ses rubans . Hé bien, tu vois, tu étais comme ta sœur, et pire encore, hypocrite! Qui est-ce? Un voyou, hein, peut- être? Un garçon que tu ne peux pas dire à ta famille : « Voilà, c’est lui que j’aime, je veux l’épouser. » C’est ça, hein, c’est ça? Réponds donc, fanfaronne!
ANTIGONE, a encore un sourire imperceptible.
Oui, nourrice.
LA NOURRICE
Et elle dit oui! Miséricorde! Je l’ai eue toute gamine ; j’ai promis à sa pauvre mère que j’en ferais une honnête fille, et voilà! Mais ça ne va pas se passer comme ça, ma petite. Je ne suis que ta nourrice, et tu me traites comme une vieille bête ; bon! mais ton oncle, ton oncle Créon saura. je te le promets!
ANTIGONE, soudain un peu lasse.
Oui, nourrice, mon oncle Créon saura. Laisse-moi, maintenant.
LA NOURRICE
Et tu verras ce qu’il dira quand il apprendra que tu te lèves la nuit. Et Hémon? Et ton fiancé? Car elle est fiancée! Elle est fiancée et à quatre heures du matin elle quitte son lit pour aller courir avec un autre. Tu sais ce que je devrais faire? Te battre comme lorsque tu étais petite.
ANTIGONE
Nounou, tu ne devrais pas trop crier. Tu ne devrais pas être trop méchante ce matin.
LA NOURRICE
Pas crier! Moi qui avais promis à ta mère… Qu’est-ce qu’elle me dirait, si elle était là? « Vieille bête, oui, vieille bête, qui n’as pas su me la garder pure, ma petite. mais à quatre heures du matin tu dors, vieille bête, tu dors, toi qui ne peux pas fermer l’oeil, et tu les laisses filer, et quand tu arrives, le lit est froid! » Voilà ce qu’elle me dira ta mère, là-haut, quand j’y monterai.
ANTIGONE
Non, nourrice. Ne pleure plus. Tu pourras regarder maman bien en face, quand tu iras la retrouver. Et elle te dira : « Bonjour, nounou, merci pour la petite Antigone. Tu as bien pris soin d’elle. » Elle sait pourquoi je suis sorti ce matin.
LA NOURRICE
Tu n’as pas d’amoureux?
ANTIGONE
Non, nounou.
LA NOURRICE
Tu te moques de moi, alors? Tu vois, je suis trop vieille. Tu étais ma préférée, malgré ton sale caractère. Ta soeur était plus douce, mais je croyais que c’était toi qui m’aimais. Si tu m’aimais, tu m’aurais dit la vérité.
ANTIGONE
Ne pleure plus, s’il te plaît, nounou. (Elle l’embrasse) pour des bêtises comme cela -pour rien. Je suis pure, je n’ai pas d’autre amoureux qu’Hémon, mon fiancé, je te le jure. Garde tes larmes, garde tes larmes ; tu en auras peut-être besoin encore, nounou. Quand tu pleures comme cela, je redeviens petite… Et il ne faut pas que je sois petite ce matin.
Entre Ismène.
Antigone chawnia Scène 4
ISMENE
Tu es déjà levée? Je viens de ta chambre.
ANTIGONE
Oui, je suis déjà levée.
LA NOURRICE
Toutes les deux alors!… Toutes les deux vous allez devenir folles et vous lever avant les servantes?
ANTIGONE
Laisse-nous, nourrice. Va nous faire du café. (Elle s’est assise, soudain fatiguée) Je voudrais bien un peu de café, s’il te plaît, nounou.
LA NOURRICE
Ma colombe! La tête lui tourne d’être sans rien et je suis là comme une idiote au lieu de lui donner quelque chose de chaud.